DE ROUILLE ET D'OS de Jacques Audiard, 2012

Publié le par Bookmaker Chinois

rouille.jpg

 

Jacques Audiard, c'est vraiment l'arnaque quand même. Que la critique crie au génie pour Un prophète, passe encore. On connaît l'audace de notre journalisme national, qui s'est offusqué la même année au festival de Cannes de la violence d'Antichrist et a raillé cette année la cérébralité de Cronenberg. Mais qu'elle récidive avec De rouille et d'os, là je dis non ! Ce n'est qu'un nouveau film "d'acteurs" comme on en voit à la pelle, superficiel et morne, qui ne fait que courir ostensiblement après les récompenses et semble en être fier. Franchement pas de quoi s'emballer. Et franchement pas de quoi non plus piquer une colère. De rouille et d'os est en fait assez insignifiant, pas forcément désagréable, parfois même parsemé de quelques beaux moments de mise en scène, mais tout bonnement inconséquent. Même l'arrogance d'Audiard finit par laisser de marbre. On le regarde tranquillement se masturber sur son soit-disant génie, mais ce n'est même plus énervant. On suit cette histoire bourrée de clichés sans entrain, en essayant de déceler çà et là quelques trucs intéressants. On en ressort comme on y est entré, et on oublie. Ce qui irrite en fait, c'est simplement l'importance que donne la presse à ce film.

 

On ne peut même pas vraiment taxer le cinéaste d'obscénité, car il traite son sujet casse-gueule avec une certaine habileté qu'il faut bien lui reconnaître, même s'il ne va jamais au bout de tout ce qu'il entreprend (le handicap, la paternité, l'amour inconditionnel, la condition salariale, la violence, la misère... Un tas de sujets à peine effleurés). La finesse n'est certes pas sa plus grande qualité à voir certaines scènes comme celle où Marion Cotillard décide de se reprendre en mains sur la "musique" de Katy Perry, mais il parvient ma foi fort bien à éviter les écueils du mélodrame à tendance sociale, et reste moralement assez irréprochable, ce qui n'était pas gagné. Même : la violence gratuite de certaines images questionne avec justesse les limites de cette morale, sans se vautrer dans le voyeurisme, et dans la première scène d'amour entre Ali et Stéphanie, le film semble tenir quelque chose, il dérange enfin. Mais Audiard n'ose pas vraiment aller plus loin.

 

Il aurait fallu réellement s'agripper, se heurter à ces corps meurtris, mais les tics fashion du cinéaste reprennent toujours le dessus et créent de la distance. De rouille et d'os est froid, il n'émeut jamais, Audiard se regarde filmer avec condescendance, les acteurs (assez impressionnants ceci-dit, même Cotillard qui est d'habitude insupportable) se regardent jouer, et le film reste renfermé sur lui-même et sur sa propre satisfaction. Ce qui lui manque, c'est l'humilité, qui aurait permis à ses personnages d'exister plutôt que d'être réduits à des stéréotypes. Passons sur les incohérences scénaristiques, les clichés et l'usage assez catastrophique de la musique (une retrouvaille père/fils, boum, la petite mélodie au piano). Si De rouille et d'os n'avait pas à tout prix cherché à être "génial", il aurait au moins été touchant.

Publié dans AUDIARD Jacques

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article