PERMANENT VACATION de Jim Jarmusch, 1980

Publié le par Bookmaker Chinois

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J'ai une certaine sympathie pour Jim Jarmusch, bien que je n'aie jamais trouvé justifié de le qualifier à tout-va de "génie" et autres termes élogieux. Il est extrêmement doué pour faire des films cool, superficiels mais incroyablement cool. Permanent vacation, son premier long-métrage, est étonnamment un des tout meilleurs. Tom Waits et Roberto Benigni n'étaient pas encore là, mais on y croise déjà John Lurie dans une formidable scène d'improvisation au saxo. Toute la coolitude beat de Jarmusch est déjà là, mais sans l'assurance et la tenue d'un Down by law. Et c'est justement ce qui en fait un film plus touchant que les autres. Réalisé avec trois dollars cinquante, Permanent vacation est un pur film no wave : absence de scénario, image et son dégueulasses, nihilisme absolu, exploration des bas-fonds de New York... Autant de caractéristiques qui en font un objet générationnel, qui a forcément mal vieilli, mais qui a le mérite de saisir le bouillonnement d'une époque, l'état d'esprit d'une jeunesse désoeuvrée, celle de l'Amérique reaganienne post-Viêtnam.

 

S'il évacue le côté hyper-sexué et hyper-trash de la No Wave au profit d'une certaine poésie, le film conserve ce qui en fait la véritable substance : la crasse, la misère, les corps malmenés, la déchéance urbaine. Le personnage principal, Aloysius Parker, un beatnick en "vacances permanentes", erre dans les ruines d'un New York presque post-apocalyptique. Il n'y croise que des fous furieux et n'y trouve que l'ennui, avant de s'envoler sans conviction pour Paris. Dès le début du film il nous disait en voix-off : "C'est l'histoire de comment je suis arrivé d'ici à là-bas, ou plutôt d'ici à ici (from here to here)". Vacuité absolue, symbolisée par un long plan où Aloysius joue au yoyo. La caméra s'accroche durant tout le film à ce corps en errance (l'acteur Chris Parker possède d'ailleurs une présence physique très étrange) qui évolue lentement, vers nulle part semble-t-il. Il avance toujours, laissant systématiquement le champ vide (comme s'il était toujours déjà absent), mais tourne en ronds, absurdement.

 

La No Wave, sorte de synthèse radicale de la Beat Generation, du bebop et du punk relevait de cet esprit naïf, un peu primitif et totalement nihiliste que représente Permanent vacation. Le son, avec cette musique dissonnante et omniprésente, ces bruits sourds et répétitifs, crée une atmosphère d'angoisse pesante, une latence menaçante caractéristiques des productions artistiques ou plutôt anti-artistiques de cette génération. Si le film de Jarmusch ne possède  pas la rage de ceux de Richard Kern par exemple, ni la fureur de la musique des Teenage Jesus ou des Contortions, il est bel et bien façonné dans le même matériau crasseux et dans le même esprit nihiliste. Et il pose déjà en même temps les bases d'un style bien à part.

 

Publié dans JARMUSCH Jim

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